Sometimes we have to... [Lucas]

Les cloches de la Campanile de la place San Marco résonnait dans la cité, répercutée par toutes les églises alentours. Dimanche, jour de messe. La population, presque entièrement chrétienne se réunissait pour prier en communion dans la, ou plutôt les maisons de Dieu de l'île. Tout était désert pendant l'office, les humains dans les chapelles, les anges auprès de Mr.Houston et les démons retranchés dans les enfers où les lieux sombres comme la bibliothèque. Venise retenait un battement de cœur.

La Reine restait le plus souvent dans ses appartements au Palais des Doges, finissant de remplir des papier ou réglant les derniers points d'un accord quelconque entre deux familles. Elle prenait ensuite un livre de l'immense bibliothèque de sa chambre, s'installait sur le balcon surplombant le Grand Canal et parcourait les lignes tout en profitant de la vue sur les autres palais. Mais ce dimanche là, elle enfila un long manteau pourpre par dessus sa robe bleue victoria et fila hors du Palais des Doges. La jeune femme sortait rarement, surtout pour les occasions importantes exigeant sa présence comme les spectacles à l'opéra, les inaugurations ou autres bals. Elle était toujours aussi émerveillée de découvrir sa ville, celle qu'elle était censée protéger, celle dont elle était responsable. Parfois la tâche lui paraissait si lourde qu'elle s'effondrait dans son lit, et d'autre fois elle se sentait tellement dans son élément que même Président lui même n'aurait pas pu l'arrêter dans son entreprise.

Instinctivement, La Reine déambula dans les rues de Venise, marchant lentement pour savourer son moment de liberté. Depuis le début des meurtres qui sévissaient dans la cité, on ne la laissait plus se déplacer sans escorte hors du Palais, puisqu'elle était l'un des démons les plus importants. C'était pesant, surtout qu'elle savait très bien se défendre seule.
Pourtant elle avait l'impression qu'on la suivait dans les ruelles désertes. C'était peut être seulement le bruissement de sa robe qui frôlait le sol, ou alors l'écho de ses pas, mais elle ne se sentait plus autant sécurisé. Son pas devint plus rapide, mais elle garda tout de même sa grâce naturelle.
Il lui fallut quelques minutes avant de se situer dans le quartier, elle était tout près des pavillons de la Biennales. Ses pas l'y menèrent le plus vite possible. Passé les grilles des jardins, surveillée par deux gardes statiques, La Reine rabattit la capuche de son manteau sur sa chevelure. Malgré le vide de population, il y a avait toujours quelques dignitaires qui trainaient dans les parages, faisant impasse sur la messe et elle ne tenait pas du tout à ce qu'on la reconnaissent.

Les Jardins de la biennale étaient de véritables labyrinthes, il était si facile de s'y perdre pendant plusieurs heures sans que personne ne soupçonne même votre présence entre les murs de verdure. Cela aurait été difficile de s'y retrouver si la jeune femme n'avait pas été élevé dans ces lieux. D'un pas assuré elle bifurqua de nombreuse fois à droite dans le labyrinthe, puis à gauche et enfin suivit un petit chemin de terre vers un autre petit jardins entouré d'une barrière en fer forgé. C'était un lieu un peu secret, que peu de Vénitiens connaissaient, un petit coin de calme. Un ban était collé à un tilleul en fleur, face à une statue d'un ancien seigneur.

La Reine s'installa sur le banc, gardant le capuchon pourpre cacher son visage. Elle se laissa envahir par les odeur de bois humide, de jacinthe et de menthe, d'herbe fraichement coupée et terre. Ce lieu lui rappelait ses après midi d'enfance avec sa nourrice à se baladait quand elle en avait marre d'apprendre avec son précepteur, quand il fallait qu'elle soit comme tout les autres enfants en train de courir partout. Elle abandonna un instant la rigidité et le protocole, sourit et soupira d'aise.
Elle sursauta quand elle sentit une présence près d'elle.

"Bonjour votre majesté. Je sais que ce n'est pas mon rôle, mais dois-je vous rappelez que les rues de Venise ne sont... Plus sûr pour une personne de votre rang ? - Il fit une pause levant les yeux au ciel après avoir analysé ce qu'il avait dit avec un ton assez amer envers lui-même - Je sais qu'on ne devrait pas arrêter de vivre sous le poids des menaces, mais au moins si on vous accompagnait..."

Même sans se retourner, La Reine savait déjà qui se tenait derrière elle et qui avait du la suivre depuis sa sortie du Palais. Bien qu'il l'avait fait sursauté, ce n'était que parce qu'elle pensait qu'il était plus loin derrière elle. Sa démarche, son souffle, le bruissement de ses habits et le petit tintement, inaudible, de sa montre se balançant dans la poche au rythme de ses pas, elle connaissait tout cela presque par cœur. Mais bien sûr personne ne le savait, même pas l'intéressé. Elle se retourna donc, un air de surprise feinte sur le visage.
A la vision de ses traits, à la fois doux et puissant, du charme qu'il dégageait, de ses yeux sombres charmeur, son cœur se serra légèrement. Comme toujours elle ne laissa rien paraître, une nouvelle fois. Sa propre froideur la mettait hors d'elle, intérieurement... Il y avait des soirs où, seule dans ses appartements, elle regardait la lueur de la lune par sa fenêtre et des larmes venaient à perler sur son visage. Elle s'imaginait différente, montrant à Venise qui elle était vraiment derrière cette couche de verni que ses précepteurs avait mis tant d'année à construire autours d'elle.

Toutes ces pensées n'avaient pris qu'un quart de seconde dans l'esprit de La Reine. Elle était trop habitué à les avoir, comme de vieilles amies qui ne veulent plus partir à partir du moment où vous les avait invité à prendre le thé. Lucas était désormais face à elle, il affichait un air tout aussi sérieux qu'elle. Elle le connaissait et l'observait assez pour savoir que cela n'allait pas durer, et si c'était le cas c'était alors qu'il y avait anguille sous roche. La jeune femme répondit à la révérence d'un signe de tête respectueux, comme elle le faisait toujours. Le protocole encore et encore, corset bien serré autours de son esprit. Il y avait en effet d'autre geste qui lui venait à l'esprit qu'un simple signe de tête.



La Reine savait tout cela, qu'il ne faisait pas bon sortir seule quand on été un démon, encore plus la représentante neutre de la paix entre Président et Mr Houston, avec un rôdeur qui avait du se donner pour mission d'éliminer tous ceux qui possédait du sang noir. Bien qu'extrèmement respectueuse des règles et autres principes protocolaires, elle n'appréciait pas du tout qu'on touche à sa liberté. De plus elle savait parfaitement se défendre face à n'importe quelle agression. La monarque était plus forte que la majorité des démons et possédait toujours le pouvoir complémentaire de se transformer en chat ailé ce qui pouvait aider pour l'effet de surprise et se sortir d'un mauvais pas.
D'un autre coté elle était très flatté par le soucis que Lucas semblait se faire pour elle. Même si ce n'était qu'une impression. Après tout en tant que conseiller c'était son rôle de « prendre soin d'elle ». Qu'adviendrait il si La Reine disparaissait en ce temps de crise...

Malgré son calme habituel, la jeune femme fut légèrement piquée de la remarque du démon. Elle se leva afin d'être presque à sa hauteur, étant donné qu'elle était plus petite que lui. Une minuscule flamme rouge sang apparue au bout de sa main, mais son visage resta impassible.



Une fois n'est pas coutume, elle s'était légèrement laissé emporter dans son élan. Dès la fin de sa phrase, elle regrettait déjà ce qu'elle avait dit, ce qu'elle avait laissé échappé. Tout d'abord le fait qu'elle n'était pas sûre d'elle quant à sa gestion de la crise qui secouait les démons. Elle ne voulait pas que quelqu'un apprenne qu'elle se sentait parfois dépasser par la situation, encore moi un de ses conseillers proches. Ensuite elle s'était adressé à Lucas sur un ton assez sec, ce que pourtant elle ne voulait pas du tout. La Reine redoutait qu'il ne se soit vexé. Elle détourna son regard qui jusqu'alors était resté fixé à celui du démon, et contourna le banc pour poser sa main sur le tilleul et s'y appuyer un peu. Elle observa l'écorce, ses milliers de petites imperfections et les animaux qui y rampait, sans jamais regarder Lucas elle reprit la parole.

« Veuillez m'excuser, je ne voulais pas être aussi vive dans mes propos. Ce n'est pas votre faute. »

LA REINE : « Je pense être parfaitement en mesure de me défendre moi même. Si je n'étais pas capable de cela, alors comment ferais je pour défendre les miens? »

LA REINE : « Veuillez m'excuser, je ne voulais pas être aussi vive dans mes propos. Ce n'est pas votre faute. »